Chapitre Quinze
Nous sortîmes de la cabine de Vaigali, les yeux rouges et les joues striées de larmes encore fraîches. J'esquissai un pâle sourire à l'adresse de Grégory et de Denko, tous les deux adossés à l'immense mât qui s'était brisé. Grégory s'avança vers moi. Il me sourit à son tour et s'adressa à Mynt :
- Sais-tu où Jegran a emmené les Selkies ?
- Je... Je crois qu'il les a enfermés à la Prison Aérienne, dit-il d'une voix hésitante.
Le Clavat hocha la tête.
- On a intérêt à tout de suite se mettre en marche, déclara-t-il finalement. La Prison Aérienne n'est pas à côté, il faut aller jusqu'aux Friches.
- Nous avons nos Chocobos, ajouta Denko.
- Nous n'en avons que trois, répliquai-je.
- Tu n'auras qu'à monter avec Grégory.
Je rougis.
La Prison Aérienne nous narguait. Elle s'élevait dans les airs, comme une montgolfière, sauf qu'elle était bien plus sinistre qu'une montgolfière. Elle transportait des centaines d'innocents, envoyés ici sur ordre de Jegran, qui ignoraient s'ils pourraient un jour sortir. Les Selkies y étaient. Ma famille adoptive y était et allait peut-être mourir.
Grégory, Mynt, Denko et moi étions cachés derrière des buissons. Nous attendions patiemment que les gardes lilties s'endorment. Sous le soleil de plomb des Friches, les Lilties s'endorment très rapidement. Au premier ronflement, nous surgîmes de notre cachette et nous postâmes au-dessous de la Prison. Grâce à ses pouvoirs télépathiques, Grégory nous transporta jusqu'au pont inférieur, avant de s'y transporter lui-même. Nous observâmes les alentours. Rien et surtout, personne. Nous pénétrâmes dans la Prison. Mynt et Denko prirent le chemin de gauche et Grégory et moi, celui de droite. Il était convenu que si nous trouvions la cellule des Selkies, nous devions siffler.
Pour plus de discrétion, nous décidâmes de marcher en équilibre sur les canalisations qui couraient de part et d'autre de la Prison. Grégory pensa que j'aurais besoin d'aide pour rester en équilibre. En réalité, c'est lui qui eut besoin d'aide. Je suis une Clavat de sang mais une Selkie d'éducation. Et les Selkies sont très adroits. Je me mis à courir sur les tuyaux, en silence. Un élément imprévu stoppa ma course : nous avions oublié qu'il n'y avait pas que des canalisations dans la Prison, mais qu'il y avait aussi des petits robots, capables de tirer des rayons lasers. Un de ces robots me tira dessus. Je tombai à la renverse et dégringolai. Grégory me rattrapa juste avant que je n'atterrisse dans les sables mortels de la Prison. Il m'assit sur un tuyau et détruit le robot. Il chuchota :
- Nous devons être prudents, ou alors...
Il eut un sourire malicieux en voyant d'autres petits robots alignés.
- Accroche-toi, me dit-il.
- Quoi ?
Il m'attrapa et j'eus tout juste le temps de passer mes bras autour de son cou. Il sauta et se servit des robots pour aller de l'autre côté de la pièce. Il se servait des robots comme des lianes, en fait. Arrivés de l'autre côté, il se mit à rire doucement, pour ne pas attirer l'attention des gardes. Je suis sûre qu'intérieurement, il éclatait de rire. Quant à moi, j'étais assez... hébétée ? Je devrais cesser de m'étonner dès que Grégory faisait quelque chose.
Une porte s'ouvra devant nous. Nous eûmes tout juste le temps de nous cacher derrière un tuyau. Jegran en sortit. Sa main rougeoyait, on aurait dit qu'elle était en cristal. Une fois Jegran parti, nous rentrâmes discrètement. Cette porte donnait sur une sorte de petit balcon, qui surplombait une grande pièce remplie de... Je portais la main à ma bouche.
- Grégory ! Regarde ! dis-je avec affolement en pointant mon doigt.
- Oh mon Dieu...