Obscurs sortilèges

Collèges de fantômes à la gueule puante,
Moines-spadassins à la bure béante,
Inquisiteurs féroces aux sentences ronflantes
Faites cercle !

Dans un chant crépusculaire
Écoutez donc la sorcière:
Pour quelques deniers d'attention
Elle vous vendra son âme
Livrant ses émotions
À vos caresses infâmes...

Sur la roue applaudissez l'impie
Arrachant mot à mot ses entrailles pourries
Elle dénude sa chair
Et paye au tout venant
Quelques grammes d'enfer
Versés avec son sang.

Faites cercle, prenez place:
Sans plus de conscience,
Léchez donc sa démence…
Voyez comme la chienne a plongé pour vous ses doigts
Au fond du gouffre où palpite l'effroi,
Retirant de sa peau boursouflée les éclats du supplice,
Et portant en bannière la souffrance et le vice …

Prenez place !
Courtisans de l’amer, buvez sur son corps offert
Le philtre nauséabond d’errances solitaires :
La roue n’aura de cesse de plonger dans la boue
Les reliquats de sa voix, et les sanglots des fous.




[j'ai hésité un peu à vous livrer cette atrocité babayaguesque ...me fais pardonner en lui collant un jumeau moins glauque, dont le titre est emprunté à une chanson de Saez...ce qui suit :]

Sauver cette étoile

Est-ce que je crois qu’on peut sauver cette étoile ?

Oui.

Est-ce que je crois qu’il y a un rire
Sous chaque goutte de pluie ?

Oui.

Est-ce que je crois endormir mes peurs
Sous un parfum d’aubépine en fleurs ?

Oui.

Est-ce que je crois que le flux de la rivière caresse nos âmes,
Quand il s’abandonne au torrent ?

Oui.

Est-ce que je crois quand j’effleure l’écume d’une vague ardente,
Toucher la matière même d’un songe ?

Oui.

Est-ce que je crois saisir l’éclat de la vie
Dans les pas précipités de vos ombres ?

Oui.

Est-ce que je crois tomber des reflets de lune
Au cœur même de la ville, dans l’œil aviné du clochard ?

Oui.

Est-ce que j’entends l’appel au creux de la transe
Lorsque tu n’es plus elle et qu’elle-même n’est qu’absence ?

Oui.

Est-ce que je crois chaque fois sombrer ?
Est-ce que je crois en ces vanités inconsistantes
Et qui pourtant nous cimentent ?
Est-ce que je crois vivre vide, à peine exister,
Nourrir, soigner, mourir ?

Est-ce que je me perds ?

Est-ce que j’ai froid d’une existence
Qui soudain, un matin, s’observe sans pitié devant la glace
Et guette ses défaillances ?

Est-ce que je vis dans la terreur
De voir m’abandonner
Ce qui me hisse d’une seconde à l’autre,
Aux marches de ma vie,
Est-ce que je guette les battements d’un cœur,
Est-ce que je dévisse et je vrille
à la moindre arythmie ?

Oui

Est-ce que je crois être,
Juste parce que j’écris ?
Est-ce que j’en entrevois le ridicule,
Est-ce que j’en souffre le dépit ?

Oui

Est-ce que je vois,
Lorsque mes paupières sont cousues,
Est-ce que j’embrasse
Lorsque mes lèvres sont scellées,
Est-ce que je sens
Lorsque mes doigts brûlés ignorent jusqu’à ta peau ?

Oui.

Oui, ton deuxième écrit donne un peu d'espoir, une douceur dans l'amer, superbe !

J'aime beaucoup aimé. Obscur mais beau.

1 vision de cauchemar quand il brasse le vécu
2 questionnement de l'humain quand il sonde son ciel

L'un ne va pas sans l'autre... et je t'assure que le monde 1 est bien dans mes rêves, dans l'inconscient de tous... (en rêve je le vois, je me glisse parfois dans la foule... impression d'étrangeté... dans ce monde on ne me voit pas... puis je m'en éloigne / toujours en rêve dans un monde plus lumineux, les personnes sont très occupées, mais elles me voient, me parlent et me laissent partir)

Le premier texte est bien plus marquant et parlant pour moi car il délivre une pensée ou un souhait certes très sombres mais sincères et profonds, alors que le deuxième n'est qu'une pensée "question/réponse" pour "s'anti-positiver", voir "s'auto-apitoyer"
Chaque vision est propre à une personne ainsi que son interprétation donc je t'ai livré la mienne Baba. Merci pour tes textes riches de "qui tu es".

...Tu as raison Damona, je suis davantage dans le premier, que j'ai pris un plaisir féroce à composer!!! Cependant pour moi le second porte une vision positive, qui est aussi moi, parfois; je ne comprends pas trop le "s'auto-apitoyer" pour ce texte-là en tout cas. C'est toujours à la fois une émotion et une surprise de voir que mes textes ont une vie qui m'échappe, construisant leur sens au gré des lectures...
Merci en tout cas Damona pour tes mots riches et sincères.

Mes mots sont sincères mais je ne pense pas qu'ils soient riches. Merci d'être autant présente au refuge, pour ma part j'ai du mal. J'en suis désolée. J'ai même pensé à faire appel aux poètes pour être administrateurs du forum pour s'en occuper bien mieux que je le fais moi actuellement.

Ah, voilà la Baba que j'adore.