J’ai trempé ma lame au feu d’un gouffre mauve
Et j’ai plongé la main dans l’iris des fauves ;
Je suis ce clochard titubant ses fulgurances avinées,
Mes gestes ralentis se moquent bien des cadres de vos vies
Bordures étroites et puant les compromis…
Je suis cet homme gesticulant dans le soir d’un parc bientôt fermé,
Je mène mes errances là-bas derrière les grilles rouillées
Qui protègent toujours l’ « autre » côté …
J’ai rendu les armes au son d’un clairon de chair,
Et j’ai plongé dans le stupre et la guerre…
Je suis ce mendiant au cloche - pied d’argile,
J’ai dansé des errances dont vous n’osez rêver,
J’ai porté mon âme à nue et à revers,
J’élève dans l’espace en gestes hypnotiques
Un château somptueux dont je suis hôte et parasite ...
Dans la cour d’apparat il a neigé trois fois,
Mes doigts saignés par l’aubépine
S’offrent en arabesques de pourpre
Et revendiquent l’éclat d’autrefois...
Je suis cet homme refusant vos sentences vos devoirs vos peines vos souffrances.
J’ai changé vos plombs en hors,
Je ne vis plus dans les murs, mais dans ce parc couturé d'infamies ;
J’endors sous la feuille d’un vieux platane mes désirs impalpables,
Et je chauffe mon corps à leur étincelle fatale ;
Une bouteille au fond épais et un carton empestant le vomi
Accompagnent mes nuits.
Mais dans l’inconsistance d’un songe, sous le ciel indigo,
Je suis sultan d’un palais de mots,
Et je respire les volutes hydromelles
D’une transe sacrificielle.