Avez-vous déjà ressenti
le bonheur par mégarde (ne confondez pas avec le bonheur par hasard – au coin d’une rue, un soir de Janvier),
le bonheur par éclats (c’est, à coup sûr, le plus blessant),
le bonheur par endroits (c’est, de loin, le plus caressant),
le bonheur par instants, le bonheur par surprise,
le bonheur par morceaux ?
Ce que je sais du bonheur, je l’ai lu dans les reflets
des larmes de ceux que j’aimais. Ce que je sais du bonheur,
mes larmes me l’ont appris :
les livres, à mon avis, ne peuvent rien nous en dire.
Je n’ai jamais ressenti le bonheur comme une mer qui donne idée de l’infini,
le bonheur est la rivière où le ciel s’est assoupi,
(l’orage est là-bas, il vient),
roseaux semblables aux cils, cils semblables aux roseaux,
-- et je suis le promeneur éternel au bord de l’eau.
Extrait de L'entrée dans le paysage /Besançon/1975