quelemondeestbeau Poète
Messages : 417 Date d'inscription : 30/04/2011 Age : 27 Localisation : Neverland
| Sujet: Lune /20 Lun 3 Juin - 21:51 | |
| J'ai connu plusieurs types d'enfermement ces derniers jours. Au début, j'étais comme un oiseau dans une cage, au pain sec et à l'eau. Constamment surveillée, mes seuls loisirs étaient les moments où Alexander devenait mon geôlier. Loisirs qui me furent retirés quand il fut surpris en train de danser et chanter. Les jours s'écoulaient très lentement, je m'ennuyais ferme. L'assaut de Spark fut comme une libération. L'enfermement sur son bateau était un délice pour moi, puisqu'il n'y en avait pas, tout simplement. Je me promenais à ma guise, au gré de mes envies sur le navire, découvrant des pièces, des cales et des cachettes. L'enfermement que je connaissais à présent était peut-être le pire. L'équipage du Cœur n'a pas pu résister aux attaques menées par Lugh. En même temps, comment peut-on vaincre la magie noire ? Le bateau de Spark n'a pas été coulé, seulement investi par les vainqueurs. Les perdants ont quant à eux été emprisonnés, dans leur propre bâtiment. Je suis restée moi aussi sur le navire, refusant fermement d'aller sur le Red Stone, le bateau où œuvrait Lugh, toujours sous le commandement du capitaine du Lost Soul. J'ai donc été enfermée... dans la cabine de Spark. J'étais libre de bouger comme je le voulais dans un espace restreint. Je n'aurais pas été si gênée d'être enfermée si les livres contenus dans la cabine n'avaient pas été retirés. Pas de papier, de crayon. Je n'avais rien à faire, mis à part dormir. J'étais enfermée dans une cage dorée. Ne pouvant m'occuper les mains pour penser à autre chose, je ne cessais de revoir Alexander allongé, mal en point. Allait-il mieux ? Je ne le savais pas. Je ne pouvais sortir, quelqu'un montait la garde devant la porte, fermée à clef. Je tentai de dormir pour m'occuper ou du moins, faire quelque chose d'utile à mon cerveau. Je n'y parvins pas, je devais à tout prix sortir. Une idée me traversa l'esprit.
C'est une folie... Je m'approchai de la porte et toquai.
- Quoi ? grogna le garde. - Je veux sortir. - Tu peux pas. - Oh mais... Ne serait-ce pas une feuille de papier ? bluffai-je avec un aplomb que je ne me connaissais pas. Il ne faudrait pas que je me coupe, n'est-ce pas ? Surtout pas au niveau du poignet... Une clé tourna dans la serrure. Plaquée contre le mur, j'attendis que le garde rentre pour me ruer à l'extérieur. Je refermai la porte à double tour : cet idiot avait laissé la clé sur la serrure. Je descendis ensuite prudemment l'échelle de bois menant aux cales, grimaçant à chaque fois qu'elle grinçait. Toutes les lumières avaient été retirées de la cale et, malgré ma grande connaissance des lieux, je trébuchai sur plusieurs objets posés à même le sol. A un moment, je butai dans un objet métallique, je n'aurais su dire quoi, qui alla valdinguer contre les poutres, révélant ainsi ma présence à toute personne qui était dans la cale.
- Encore toi, Lugh ? Tu étais plus discret la première fois ! - Non, Monkey, c'est Leanne ! J'entendis des chuchotis plus loin, sur ma gauche.
- Comment es-tu sortie ? demanda Monkey, surpris. J'atteignis enfin la grille. Les perdants avaient été entassés dans cette petite geôle. Certains étaient assis par terre et dormaient, adossés aux grilles.
- Je dispose d'un avantage extraordinaire, répondis-je avec un sourire complice. Et... je suis bonne comédienne.
Je posai ma main sur un barreau, sérieuse.
- Où est Alexander ? - Ici... murmura une voix faible. La cellule pouvait être contournée sur trois côtés : je la contournai donc sur la gauche, vers l'origine de la voix. Le jeune mousse était très pâle, et les traces grises de son cou tranchaient sur la blancheur cadavérique de sa peau. Je m'agenouillai près de lui, seule la grille nous séparait.
- Comment te sens-tu ? commençai-je, plus angoissée que je ne voulais bien le montrer. - Pas très bien. Je ne tiens plus debout. Passant le bras à travers les barreaux, je lui pris la main, au bord des larmes.
- Tu ne vas pas mourir, n'est-ce pas ? Tu... ne peux pas... me laisser. Je... - Tu devrais partir, Lugh va rappliquer ici. Ils ont dû comprendre où tu étais allée. Je hochai tristement la tête. Je ne pouvais pas le laisser là, presque agonisant.
- Je reviendrai vite. Je me relevai. Alexander me retint doucement et me fit signe de me rapprocher.
- Leanne, ne te mets pas en danger pour moi, chuchota-t-il à mon oreille tandis que les autres prisonniers tournaient les yeux. Je tiens vraiment à toi. Il lâcha ma main. Monkey m'intima de partir : si Lugh me voyait ici, il risquait de se défouler sur mon ami. Je remontai sur le pont et rejoignis discrètement la cabine de Spark. Par chance, personne n'avait entendu le remue-ménage qui avait eu lieu quelques minutes plus tôt. Je libérai le garde, qui me fixa avec un mauvais regard et regagnai ma prison.
Durant trois jours, je ne fis rien d'autre que dormir et regarder la mer de la fenêtre de la cabine – seul luxe que Lugh, infâme rouquin, n'avait pu me prendre. Assise au petit bureau de ma prison, j'observai l'horizon, qui semblait courbe, et les gerbes d'écumes que soulevait le Cœur, suivi du Red Stone et ses voiles rouge velours. J'aurais aimé m'énerver un bon coup, briser ce que ma force me permettait de briser. Mais j'avais depuis bien longtemps dépassé ce stade. De toutes façons, je ne pouvais rien briser ici, tout était en bois massif. Le Red Stone était loin, il paraissait à peine plus grand qu'un chat. Si je pouvais d'une simple tape détruire ce bateau de malheur... Je posai le plat de ma main contre la vitre : la fenêtre, mal fermée, s'ouvrit sans aucune résistance. Figée, la main toujours en l'air, je réfléchis à toute allure aux possibilités qui s'offraient à moi. Je pouvais sauter et ainsi retrouver mon corps de sirène. Mais pour quoi faire ? Où aller ? J'ignorais totalement notre position et je me fatiguerais bien vite à chercher désespérément une île malgré ma queue de poisson. Nous voguions depuis des jours et des jours sans rencontrer aucune île. Et puis, la vie d'Alexander était toujours en danger. Une autre option se présenta à moi.
- Yo ho, yo ho Vive la piraterie. Je murmurai presque ces mots, chantant à peine. Lyrina m'entendrait. Elle guidait toujours le bateau, donnant des informations de temps à autre si le cap venait à changer.
- On pille, on saccage On monte à l'abordage. Le garde risquait de m'entendre si je chantais plus fort. Mais j'étais confiante : Lyrina m'avait assuré qu'elle m'entendrait toujours, peu importe l'endroit où j'étais ou l'intensité de ma voix. J'étais la Sirène aux Écailles de Lune, elle était la première sirène à m'avoir entendue, du fond de cette baie. Alors elle m'entendrait toujours.
- Buvons mes amis, yo ho. Une tête blonde émergea élégamment de l'eau comme seules ces filles de l'eau savent le faire. Un problème subsistait : comment lui parler sans être repérée ? Pense, Leanne, je pourrais t'entendre. Je croyais que tu ne lisais pas dans les pensées, songeai-je, surprise. Seulement les tiennes. Sa voix caressante paraissait plus normale, telle que je l'entendais dans ma tête. Je suis ta Penseuse, douce Leanne. Ma... Penseuse ? Je t'avertirai des menaces qui planent sur toi et les tiens. Je te suivrai partout où tu iras, sans que tu le saches vraiment, masquée par l'ombre. Quand tu auras besoin d'aide, je serai là. J'étais destinée à t'entendre la première, à t'aider dans cette quête. Cette chanson, la première que tu chantais de ta vie, est devenu ton Chant d'Appel, celui auquel je répondrai toujours, le seul que j'entendrai même si tu murmures des mots inintelligibles.
Je hochai doucement la tête, digérant tout ce que Lyrina venait de m'apprendre, uniquement par la pensée. Je la vis sourire, malgré la distance qui nous séparait. Que voulais-tu ? demanda-t-elle. Sommes-nous loin de l'île ? La sirène réfléchit un instant et observa l'étendue d'eau salée autour d'elle. Nous y serons bientôt. Il nous faudra traverser un passage dangereux mais s'ils suivent mes indications, tout ira bien. Nous nous reverrons sur l'île alors. Elle opina du chef. Je m'apprêtais à refermer la fenêtre quand elle ajouta : Leanne, ce Lugh... Son nom signifie « lumière » en irlandais. Tout ce qu'il n'est plus, malgré une jeunesse pieuse et un tempérament bienveillant. Sa rencontre avec le capitaine l'a transformé. Littéralement. Pas besoin de connaître le nom du bateau pour savoir de quel capitaine elle parlait. Le capitaine l'a surnommé Aillil, un autre nom irlandais. Qui signifie ? Fantôme. |
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Dark-Phoenix Poète
Messages : 1056 Date d'inscription : 04/09/2011 Age : 34 Localisation : Here
| Sujet: Re: Lune /20 Ven 7 Juin - 21:45 | |
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