Restait ce Ange Lego. Pouvait-elle lui faire confiance aveuglément ? Ne risquait-elle pas de tomber sur un Strickland version frenchie ? De ce que Katie avait compris, les deux hommes entretenaient des rapports conflictuels. Une divergence de caractère sûrement.
Katie se laissait petit à petit tenter par l'aventure, poussée par le retour à une liberté trop longtemps entravée et la perspective de pouvoir se retrouver au calme , loin de l'agitation commerciale et médiatique qui la pourchassait commes des papillons de nuit devant un projecteur. Oui, vraiment l'idée n'était pas mauvaise. Cet enfoiré de Strickland. Ce qui la maintenait sous l'influence de cet homme, c'était la possibilité de jouer et de sortir un second opus. Qu'il ne semblait pas pressé d'enregistrer, se rappela t-elle, comme pour se donner du courage.
Elle paya son coca et sortit du bar, sous un soleil aveuglant ; en contraste complet avec la pluie battante de la veille. Elle prit la direction de l'hôtel. Pousser Strickland à rompre un contrat juteux n'était pas chose aisée et elle se demandait bien comment y parvenir.
La première chose qu'avait à faire Katie était déjà de ressortir le contrat et d'en lire attentivement les clauses, chose qu'elle n'avait jamais faite. A la pensée de cette erreur impardonnable, même sous l'excuse de la jeunesse, elle se mordit les lèvres. Enfin, le mal était fait, il ne servirait à rien de focaliser son esprit sur cet épisode passé.
Il fallut remuer bien des effets et pousser d'innombrables jurons, imprononçables ici, avant que Katie ne remette la main sur son contrat. Elle en parcourut chaque ligne, en épluchant le moindre détail, en revenant en arrière par plusieurs fois. Il n'y avait qu'une manière de rompre le contrat, sans l'accord de la tierce partie, et cette évidence glaçait le sang de la jeune fille : la disparition. Ou en d'autres termes, le décès.
Ce n'était pas la solution la plus judicieuse qui soit aux yeux de Katie. Elle allait devoir procéder différemment. Elle pensait à une autre hypthèse, le culot, aller dire ses quatres vérités à cet homme acerbe qui lui pourrissait la vie et tout envoyer balader, aussi simplement que ça. Seulement ça ne l'était pas, simple. Il fallait espérer que Strickland n'intente rien. Mais cela valait peut être le coup d'essayer. Plus Katie y pensait, plus elle parvenait à se convaincre que le jeu en valait la chandelle. Elle ramassa donc son contrat, et se dirigea vers les escaliers, essayant tant bien que mal de masquer son excitation.
Elle repéra Strickland au salon, occupé à siroter un cocktail d'une couleur ambrée, fort attirante au demeurant. Elle rassembla ses forces et alla se planter droite devant lui. Aucun mot ne jaillit de sa bouche, mais elle leva le contrat, le déchira, et en eparpilla les miettes sur le sol.
Katie, sous le coup de l'adrénaline, fila une gifle monumentale à Strickland, qui sous l'effet de surprise ne tenta même pas de répliquer. Elle tourna les talons, monta dans sa chambre quatre à quatre, prit deux trois vêtements et effets personnels, sa gratte et moins de dix minutes plus tard, elle montait dans un taxi. Elle prit à la banque une certaine somme d'argent, assez, jugea t-elle pour couvrir une période sans gains.
Déja les tours de l'aéroport se dessinaient au loin.
Ange Lego l'attendait. Seul. Ses lunettes noires ne semblaient décidément jamais vouloir quitter son nez. L'avion était à l'heure, et ils ne tardèrent pas à embarquer. Ils prirent place sans dire un mot. Katie se sentait libérée d'un fardeau, le coeur léger et l'esprit détendu. Elle laissa ses pensées wagabonder alors que l'Airbus prenait son envol. Ses yeux se fermèrent.
Elle s'endormait.