Il en était là le petit prince. Il en avait visité des planètes et des mondes. Mais cet aviateur étrange, tombé du ciel lui plaisait beaucoup. Il avait réussi à lui dessiner un mouton comme il se l’imaginait. Il était content et si fier de ce cadeau qu’il emporterait sur sa terre natale. Bien sûr, il l’éduquerait afin qu’il ne s’attaque pas à son amie la rose. Mais il commençait à se poser des questions. Une amie se devait d’être gentille et quelquefois, elle le blessait. Oh pas seulement avec ses épines, avec ses paroles aussi. Il avait bien apprivoisé un renard, mais quelque chose, tout au fond de lui, lui disait de se méfier de cet étrange animal.
L’aviateur était toujours plongé dans son moteur. Il avait chaud. Le petit prince n’avait ni chaud, ni faim ni soif. Il ne comprenait pas bien pourquoi et comment cet amas de ferraille pouvait voler. Il n’avait pas besoin de cela pour se déplacer. C’est peut être parce qu’il était le Petit Prince
Il hésitait un peu, n’osait pas trop déranger l’homme. Il avait l’air si occupé, le nez dans le moteur de l’avion. Mais, en même temps il avait lu beaucoup de tendresse dans ses yeux, il sentait que c’était un être bon qui regardait avec les yeux du cœur.
Une question turlupinait l’enfant depuis qu’il était tombé par hasard sur cette planète, en plein désert. Il entendait parler d’amour mais sentait bien que quelque chose lui échappait. Il prit son courage à deux mains et s’assit sur un rocher en face de l’avion. Il jeta des petits cailloux sur la carlingue de l’appareil afin d’attirer l’attention sur lui. L’aviateur sursauta mais posa néanmoins ses beaux yeux bleus sur le gamin. Que voulait-il encore ?
« s ’il vous plait, dessine moi l’amour » dit le petit prince. L’homme se frotta la tête, quelle étrange question de la part d’un si petit garçon ! Il posa ses outils et fit face au garçonnet « tu sais c’est compliqué, bien plus compliqué que de dessiner un mouton »
« c’est drôle, les grands disent toujours ça quand ils ne veulent pas répondre. C’est un secret ? et ne me dis pas que je suis trop petit pour comprendre. Allez, s’il vous plait, dessine moi l’amour »
L’homme sortit de sa poche son calepin et son stylo et dessina une rose. Le petit bonhomme avait les larmes aux yeux. « Mais non, c’est pas ça. Ca c’est l’amitié qui quelquefois me fait mal avec ses épines ! »
Alors, il lui dessina un cœur. Le petit garçon réfléchit un instant. Ce signe là il l’avait vu dans un jeu de cartes. L’amour ça ne pouvait pas être ça .
Devant sa mine boudeuse, l’homme prit alors une grande inspiration. Il allait essayer de lui expliquer avec des mots qu’il comprendrait.
« tu sais, l’amour c’est à la fois simple et compliqué .C’est quand deux personnes ne peuvent pas vivre l’une sans l’autre. Quand l’une a mal ; l’autre souffre et quand l’une meurt, l’autre meurt un peu aussi. »
Le petit prince réfléchit longuement et regarda l’aviateur « oui, mais si je veux emporter l’amour sur ma planète, il faut que tu me fasses un dessin »
L’homme soupira une fois de plus, décidément c’était bien
compliqué les petits garçons et celui-là tout particulièrement.
A bout d’argument, il prit une nouvelle feuille de son carnet, y dessina une boîte en forme de cœur avec un joli ruban bleu. « Voilà, dans cette boîte, il y a tout l’amour du monde. Quand tu retourneras chez toi, tu l’ouvriras et toute ta planète sera inondée d’amour. Même ta rose ne pourra plus te faire de mal et tes baobabs qui t ‘empoisonnent la vie cesseront de pousser ».
Un grand sourire illumina le visage du petit garçon. Il se voyait déjà de retour chez lui ouvrant ses deux boîtes.
La nuit avait étendu son manteau sur l’immense désert. L’aviateur s’endormit sous la voûte céleste. A son réveil, il chercha le petit prince mais ne le trouva pas. Il vit juste les traces de ses petits pieds nus dans le sable, puis plus rien.
Il avait disparu comme il était venu, en emportant ses dessins.
La nuit suivante, l’homme vit une nouvelle étoile qui brillait plus que toutes les autres. Une étoile qu’il n’avait jamais vue auparavant et il sut que le petit prince était arrivé à destination. Il avait ouvert sa boîte en forme de cœur, semant l’amour dans son petit monde.
FIN