Juliette n'en pouvait plus. Toutes ces nuits à le voir se lever sans bruit, prendre le fusil, épier les volets et la porte, débusquer le bruit, le craquement, le signe qui confirmerait « leur » présence. Toutes ces journées brisées de haine, de noirceur, et de désespoir. Elle émit le désir, le besoin, de partir, parce qu'elle ne pouvait plus vivre ça, avec un compagnon qui avait tombé le masque et se révélait tout autre, peut-être bien le contraire de ce qu'elle avait cru, de l'image qu'il projetait de lui... Sentiment intense d'avoir été mystifiée, manipulée, mise en cage, rentrée de force dans un moule, la force de son amour retournée contre elle-même.
Leur fils avait 5 ans. Il l'emmena faire un tour.
Comme ils ne rentraient pas, Juliette commença à s'inquiéter. Le téléphone sonna, c'était lui :
- Je suis à l'aéroport, si tu me quittes, tu ne reverras plus jamais ton fils, je pars avec lui, et tu ne le retrouveras jamais ! Il ne verra plus jamais sa mère ! Tu vas souffrir toute ta vie ! Alors qu'est-ce que je fais, je reviens et tu restes, ou je pars... ?
Tout ce qu'elle espère aujourd'hui c'est qu'il n'était pas à côté, et qu'il n'entendait pas...
Comment avait-elle pu croire qu'elle vivait tout cela de son plein gré, qu'elle avait encore le choix de partir... Le piège s'était refermé sur elle, il y avait bien longtemps, et jusqu'à la majorité de son fils, il n'y avait pas d'issue possible, il lui fallait assumer sa vie avec lui.