Le mariage de l’amiral
Oh, qu’il était beau dans son joli costume,
En ce jour merveilleux que le rire allume,
Tout entier vêtu de blanc,
De la casquette jusqu’aux gants.
Et quelle fierté dans son regard !
Quelle droiture dans sa posture !
Ö, quelle joie transcendantale
Chauffait le cœur de l’amiral !
À ses côtés, elle,
Robe immaculée à longue traîne,
Telle une actrice américaine,
À la beauté blonde irréelle,
Pleurait des larmes de jouvencelle.
Émouvante scène d’un feuilleton
Diffusé en mondovision.
Les invités, triés sur le volet,
À bord d’immenses cabriolets,
Un à un, étaient arrivés
Avant de majestueusement défiler.
Vêtus comme des paons
À la fête du printemps,
Ils remontèrent le tapis rouge
Sous les hourras bêtes de la foule
Ö, quelle belle fête !
Pensait-on dans chaque tête,
Et quelle belle journée
Pour ce nouvel été !
De la cérémonie vint le moment.
L’église, mère de tous les beaux sentiments,
Avait dépêché un grand prélat
Porteur d’une toge d’un bel éclat.
Il fit quelques gestes académiques,
Dit deux ou trois formules magiques
Et en un tour de main,
Scella à jamais deux destins.
Ö, comme il était heureux l’amiral
À l’instant de glisser l’anneau marital
Et elle, petit bouvreuil craintif,
Comme elle semblait loin de tous ces artifices !
Quand le soir, le dîner fut servi,
Ce fut sur des tables richement garnies.
Porcelaine, or, cristal, argent,
Reflets d’étoiles du firmament.
Les convives, comtes, rois et princesses
De couronnes tombées de vieillesse
Se régalèrent de mets délicieux
Confectionnés par seigneur maître-queux.
Puis comme il importait d’être original,
La soirée s’acheva par un grand bal.
Les jours suivants, tout retomba dans l’oubli.
Il faut dire que le pays est si petit
Que sur un planisphère papier
Le symboliser d’un point est exagéré.
Ö, comme il fut beau le mariage de l’amiral
Et de sa princesse des terres australes.
DRK