un texte qui me tient particulièrement à cœur, écrit à la demande de ma sœur qui est aussi l'auteur du dessin.Il est difficile de faire abstraction du passé :
Certaines informations nous imbibent, dont nous ne sommes pas l’origine ;
Je flambe et je tournoie dans le ballet des cimes
Alcool brûlant la gorge au limon des souvenirs,
La lumière qui passe à travers les ombres de l’été
Scarifie tes bras dénudés.
Nous sommes les souvenirs des autres autant que les nôtres :
A peine les formons nous qu’ils s’amalgament,
Ce n’est pas nous qu’ainsi ils réclament
Mais une attention ancienne et absolue ;
Ce n’est pas nous ainsi qu’ils acclament
Mais le tribut des âmes.
Clouée au sol je m’enracine
L’arbre troue ma mémoire,
Et sa ramure déchiquetée
Claque mes peurs dans la brise du soir
-quel est le sang qui suinte sous l’écorce ?
Autrefois j’y ai puisé ma force.
Nous sommes les souvenirs des autres autant que les nôtres :
A peine élevons-nous ces murs de mousse
Que la vigne rousse des automnes enfuis
Confond en gémissant l’homme et l’oubli ;
Nous sommes les souvenirs des autres
Autant que les nôtres.
Sur le muret du cimetière
J’ai tant frotté ma main que je ne sais plus
Où est la chair où est la pierre où est la chair
L’air se parfume au maquis d’Espagne,
Récits fabuleux, crépuscules infinis,
Fine résille m’emprisonnant l’esprit.
Sommes-nous le songe d’un autre
Avant que d’être le nôtre ?
Nous gisons dans l’ombre avide
Où les disparus tissent leur chrysalide ;
Sous leurs voix chéries s’étouffent nos pas
Et je me rêve dans leurs bras.
Dans cette ombre survivons
Comme survivent ceux que nous aimions.