Dans la cité des corsaires, au pied des remparts
Est assise une jeune femme, une mendiante
Elle s’installe dès l’aube, dans le matin blafard
Reste là tout le jour, qu’il pleuve ou qu’il vente

Le soir, elle se perd dans le dédale des ruelles
De la ville fortifiée, personne ne sait où elle va
Sa vie me semble un fardeau bien lourd et cruel
Quand les pavés mouillés résonnent sous ses pas

De rares passants lui jettent une petite pièce
Sans doute pour se donner bonne conscience
Pensant qu’en agissant de la sorte, ils achètent
Le pardon et l’absolution de toutes leurs offenses

Quelquefois, je l’entends murmurer une comptine
Une histoire qui lui rappelle son passé bien lointain
Elle se la récite pour elle même toujours en sourdine
Se donnant ainsi du courage pour ses lendemains

Je l’observe depuis des jours, sans oser m’approcher
Jusqu'à ce matin de décembre pluvieux et morose
Où un homme étrange est venu doucement l’accoster
Dans sa main tendue, il dépose la plus belle des roses

Quand elle a relevé sa tête vers lui en souriant
Pour la première fois, j’ai vu son regard s’illuminer
Et j’ai compris qu’elle n’était pas là pour l’argent
Depuis tout ce temps, c’est l’amour qu’elle attendait

Elle s’en est allée, tenant dans ses mains son trésor
Certains l’ont vu marcher vers le rocher du Grand Bé
Les nuits de pleine lune quand les vents soufflent fort
J’entends comme un murmure, une douce mélopée.