Il y a bien longtemps dans une contrée étrange, aux confins des monde, vivait une tribu de corbeaux.
Raven était de loin le plus beau et le plus puissant. Le soleil donnait à son plumage un reflet d’un bleu profond et , toutes les femelles de sa race le courtisaient, pensant donner naissance à une lignée royale. Mais lui, se sentait différent et jamais aucune de ses congénères n’avait réussi à faire battre son cœur assez fort pour qu’il en fasse sa compagne.
Souvent, dès l’aube, il partait seul, planant par monts et par vaux, savourant un sentiment de liberté immense. Il était toujours triste, il savait, tout au fond de lui qu’il était promis à un grand destin et cherchait désespérément lequel. Il planait ainsi toute la journée et, le soir venu, s’en retournait à contrecœur parmi les siens. Pourtant, il se tenait toujours à l’écart des siens et ceux ci finirent par l’ignorer le croyant trop imbu de lui-même. Au fond, comme tous les êtres différents, il était très malheureux.
Une nuit pourtant, il fit un songe étrange. Très loin au nord, il voyait nettement une forêt profonde, il se voyait la survoler et était attiré par elle. Il se réveilla au petit jour épuisé comme s’il avait volé toute la nuit. Durant des jours, son rêve l’obséda. Il savait au fond de lui que cette forêt existait quelque part et que s’y trouvait la clef de toutes ses interrogations.
Dès ce jour, il n’eût de cesse de la découvrir. Il se réveillait bien avant l’aube et volait tout au long du jour. Mais, dès que la lune se levait, il savait qu’il fallait qu’il s’en retourne dans son monde.
Ces virées l’épuisaient et, peu à peu, il perdait de sa superbe. Il prit donc un peu de repos, et décida d’attendre l’été suivant. Les jours étant plus longs, il pourrait voler plus longtemps.
Il avait hâte et le temps ne passait pas assez vite à son goût. Un matin pourtant il sut que c’était le moment et il partit dès l’aube. Il vola toute la journée, vers le nord et, enfin, au loin il reconnut sa forêt. Il planât un moment et vit la plus belle des créatures endormie sur un chêne. Déjà, le soleil plongeait vers l’occident et, il savait qu’il devait passer la nuit avec son clan pour éviter les dangers de la nuit.
C’est donc la mort dans l’âme qu’il repartit de son vol majestueux vers la plaine. Il n’eut plus de repos pensant sans cesse à cette boule blanche qui dégageait tant de pureté. Et, il sut que son cœur s’était éveillé à l’amour. Les siens le trouvaient de plus en plus taciturne et ne comprenait pas pourquoi. La nature lui avait donné les meilleurs attribut et il s’en fichait.
Dans la forêt, au même moment, Snowbird s’éveillait sous le croissant de lune. C’était une chouette de lignée royale et elle se morfondait dans la profondeur de la forêt. Elle aussi était convoitée par tous les mâles de son groupe mais s’était toujours refusée à eux. Elle était solitaire et chassait toujours seule. La nuit était son royaume mais, comme toute femelle elle était curieuse et aurait bien voulu connaître le jour et les rayons du soleil qui réchauffe le plumage.
Le maître de la forêt était un grand duc et sa sagesse était légendaire. Souvent il racontait des histoires du monde de la lumière et Snowbird était fascinée et regrettait de n’être pas née « oiseau de jour ».
Elle avait bien essayé de résister au sommeil et à la clarté du soleil, mais n’y était jamais parvenue. La lumière aveuglante de l’astre du jour lui brûlait les paupières et elle regagnait vite les profondeurs de sa forêt.
Ce jour-là, pourtant elle aussi avait fait un rêve étrange. Une créature du jour au plumage noir était venue la visiter, il lui avait même semblé qu’elle avait senti un frôlement d’aile, une chaleur bienfaisante qui l’avait enveloppée toute entière.
Cette nuit là, elle chassât très peu, le cœur n’y était pas, son rêve l’obsédait.
Déjà les étoiles s’éteignait une à une au firmament et elle regagnât son vieux chêne pour la journée.
Raven, à l’autre bout de la plaine, s’éveillait, le soleil dardait ses rayons sur la plaine et réchauffait sa carcasse. Mais, trop épuisé par son exploit de la veille, il somnolât toute la journée. Il n’avait pas très faim pensant à sa belle. Il savait bien que c’était impossible. Une idylle entre un oiseau de jour et un oiseau nocturne, ça ne s’était jamais vu. Mais au fond de lui, il se savait tellement différent, et son cœur battait si fort dès que lui revenait le souvenir de cette vision qu’il voulait croire que c’était un signe du destin.
Snowbird dépérissait, en fait elle était atteinte de la maladie d’amour mais ne le savait pas.
Le grand duc qui veillait sur toutes ses ouailles eût vent de la tristesse et convoquât la belle. Elle lui racontât son songe et lui qui d’habitude maîtrisait toute les situations était troublé. Lui connaissait des secrets ignorés de tous et pourtant ce récit l’agaçait au plus haut point. Une vieille légende disait qu’un jour un roi viendrait, emportant la princesse des ténèbres bien au delà de tous les mondes connus.
Il n’en dit rien, conseillant à la princesse d’oublier ce rêve et d’enfin choisir parmi tous ses prétendants un mâle digne d’elle.
Elle repartit dubitative, elle sentait bien que le maître lui cachait quelque chose. (à suivre...)
