Chapitre Treize
Le moine hocha la tête. Il nous pria de rester dans le petit salon et sortit de la pièce. Je m'assis dans un fauteuil. Grégory se dirigea vers la Bibliothèque et en sortit un livre qui m'était familier. Il le feuilleta et le referma d'un coup sec.
- Qu'est-ce que ça fait d'être une porteuse ? me demanda Denko.
- Pour le moment, je ne sais pas trop. C'est... Je ne sais pas quoi te dire.
Nous patientâmes sans un mot. Grégory avait rouvert le livre qu'il tenait dans ses mains. Je le reconnus : il s'agissait du livre présent dans la Bibliothèque du Monastère, Les Quatre Tribus et le Principe du Cristal.
Des bruits de pas résonnèrent dans le couloir d'un manière très sinistre. Je me crispai. Ce n'était que l'abbé qui revenait. Une jeune fille l'accompagnait. Vu le grand sourire qu'elle m'adressa, ce ne pouvait être que Neïla. Elle s'avança vers moi, un peu hésitante et toujours aussi timide.
- Bonjour Natacha, dit-elle d'une voix douce. Grand-père m'a parlé de tes nouvelles facultés. Je ne suis pas une porteuse mais ceci m'intéresse beaucoup. J'ai fait quelques recherches (Elle rit devant mon air dubitatif.). Oui, je sais, je suis très rapide. Ta mère Léléïa était aussi une porteuse mais elle avait caché ses pouvoirs aux moines. Elle avait le pouvoir de la cristallisation. C'est-à-dire qu'elle pouvait transformer n'importe quoi en cristal.
- Tous les femmes de ta famille avaient ce pouvoir, poursuivit le moine. Je me demande bien pourquoi tu es une guérisseuse...
- Ce pouvoir lui faisait très peur, reprit Neïla.
Je hochai la tête, pensive. C'est vrai que c'était étrange. Ma famille était une famille de... « cristalliseuses » ? Et moi... Je suis une soigneuse. Comme c'est étrange... Grégory s'avança vers l'abbé et déclama :
- Moi, je sais peut-être pourquoi.
Nous nous retournâmes tous vers lui.
- Etant donné que je suis un porteur, les Mogs m'avaient expliqué deux-trois choses nous concernant.
- C'est-à-dire ? rétorqua Denko en poussant un soupir agacé.
Je ne compris pas bien l'agacement de mon ami.
- Les femmes de la famille de Natacha se sont toujours mariées avec des non-porteurs, si on peut dire ça comme ça. Or, lorsque que deux porteurs ayant le même pouvoirs ont un enfant, cet enfant possède des pouvoirs, certes, mais différents. Je pense que ton père est..
- Ou était, répliquai-je.
- Heu... Oui... Ou était un porteur, capable de cristalliser ce qu'il touchait.
Il eut un bref sourire gêné. Je ne lui connaissais pas ce sourire.
- Ce qui signifie, reprit-il, que tu aurais dû être une « cristalliseuse », or, tu es une soigneuse.
- Donc, si mon père n'avait pas été mon père, j'aurais été en mesure de tout transformer en cristal. Oh !
Je plongeai ma main dans ma poche et en sortit l'éclat rouge. Je le conservai toujours avec moi, par prudence.
- Vaigali l'a trouvé dans la chambre de ma meilleure amie, Mina.
Neïla blêmit en voyant l'éclat.
- Où est-elle ? dit-elle d'une voix blanche.
- A la Guilde, sûrement, supposai-je en me tournant vers Denko.
En croisant mon regard, il baissa la tête et se tordit les mains avec nervosité. Il s'avança vers moi.
- Je... Je n'ai pas osé de le dire dans la lettre mais... Mina a... disparu...
Un nœud se forma dans ma gorge. Je sentis une larme au coin de mon œil. Je l'essuyai d'un revers de manche rageur et foudroyai Denko des yeux.
- Comment as-tu pu me cacher une chose pareille ?! m'exclamai-je, ma voix résonnant dans le Salon secret.
- Je savais que tu aurais cette réaction et...
- Et quoi ?! Quand pensais-tu me le dire ?
Il posa une main sur mon épaule. Je la repoussai.
- C'est ignoble ce que tu as fait.
Denko recula.
- Je... J'ai une très mauvaise nouvelle à t'annoncer, Natacha, dit calmement Neïla, une très funeste nouvelle.
Tout le monde se tourna vers elle. Elle rougit. L'abbé avait raison : elle était très timide. Elle s'éclaircit la voix.
- Un cristal d'origine minérale est de couleur bleue. Un cristal d'origine...
Elle s'interrompit avant de reprendre d'une voix tremblante :
- Un cristal d'origine humaine est rouge...
Je restais figée. J'avais compris. Et ça me brisait le cœur en mille morceaux.
- Mina est...