Elle se reveilla quand une voix d'hôtesse, désagréable au demeurant, demanda d'attacher ses ceintures. L'atterissage à Roissy se fit en douceur, d'autant plus que la jeune fille était encore à moitié endormie. Elle suivit Lego, embrumée, dans les méandres de l'aéroport, rempli d'hommes pressés, de familles stressées, de jeunes paumés. C'est la première fois qu'elle venait à Paris, et de surcroît accompagnée d'une homme aussi mystérieux qu'inconnu. Avait-elle fait le bon choix en plaquant Strickland et sa vie toute tracée ? Non, elle se refusait à s'interroger de la sorte, c'était mauvais pour elle. Ange Lego n'avait pas l'allure d'un salopard ni d'un mac. Elle sentait qu'elle pouvait lui faire confiance et qu'il l'aiderait au besoin. Après tout n'avait il pas saisi toute la solitude et le désarroi qu'elle éprouvait en Suisse ? Il semblait si serein, si sur de lui. Elle le suivit au dehors alors qu'il hélait un taxi. Ils s'engouffrèrent à l'arrière, et après qu'Ange ait indiqué le nom d'une rue, la voiture se mit en marche. Il ne se passa pas 5 minutes. Pas 5 minutes avant que le chauffeur, un gars dans la quarantaine, ne jette des regards de plus en plus fréquents dans son rétroviseur. Il ne reconnaissait pas Katie en tant que chanteuse, mais il semblait porter un vif interêt à sa poitrine. Mais alors qu'il se se rincait l'oeil une fois de plus, elle lui jeta un regard si noir qu'il retourna immédiatement à sa conduite, l'air déçu. Elle avait trop connu de mecs dans ce genre pour le laisser faire sans broncher.
Arrivés à destination, le taxi stopppa, Lego paya et tous deux sortirent du véhicule, qui ne tarda pas à redémarrer.
"On devrait interdire les rétroviseurs intérieurs dans les taxis, commenta sobrement Lego.
- En effet. Mais ce n'est rien, je suis habituée.
Il s'engagea dans une ruelle annexe. A peine une centaine de mètre plus loin, il poussa la porte d'un bar. Elle recula d'un pas et ses yeux parcoururent le panneau, où on pouvait lire, en lettres rouges lumineuses : « An another way ». Curieux nom pour un bar, mais ça lui plaisait drôlement bien. Elle suivit donc avec entrain Lego. La chaleur ambiante lui réchauffa les sens et elle ouvrit des yeux écarquillés. Tous les murs étaient tapissés d'affiches d'artistes du Rock, d'objets, et même, sur d'épaisses poutres de bois, d'instruments. Se côtoyaient donc aux murs Little Richard, Syd Barret, Joan Jett, Ian Curtis, Sonic Youth et bien d'autres encore ! Son regard se jetait d'affiche en affiche, de mur en mur, avec un émerveillement grandissant non dissiumulé. Au fond du bar se trouvait une scène, petite mais attirante et chatoyante. Katie parcourut le bar désert, déambulant de table en table, au son de « Bad Reputation » que diffusaient les enceintes.
Elle revint se poser auprès d'Ange, au bar, qui lui offrit un café. A sa grande surprise, les tasses étaient ornées de paroles de chansons. La sienne portait ces inscriptions :
''How I wish, how I wish you were here.
We're just two lost souls swimming in a fish bowl, year after year,
Running over the same old ground. What have you found? The same old fears.
Wish you were here.''
Pink Floyd. Elle se délecta.
